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Éclipses N° 72 : Clint EASTWOOD, l'épreuve du temps

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Critique : Jackie  

Jackie
(Pablo Larraín, 2017)

Les deux Abraham (de Lincoln à Zapruder)

par Michaël Delavaud le 13.02.17

Le Chilien Pablo Larraín, né en 1976, est un cinéaste du passé. Ou plutôt un cinéaste puisant dans les eaux troubles du passé afin d’abreuver le présent et la vraie modernité de son cinéma. Coup sur coup sont sortis en France ses deux derniers films, tournés l’un à la suite de l’autre, Neruda (film « hergéen » sur la fuite du poète communiste suite à la Chasse aux Sorcières du Président Videla en 1948) et Jackie.

Jackie est comme un aboutissement dans cette démarche du cinéma de Larraín de converser avec le passé et d’en faire suinter la sève mythologique. Narrant les quelques jours de la vie de Jackie Kennedy (incarnée par une Natalie Portman double, à la fois dans la performance psittaciste et dans l’interprétation très fine d’une obstination proche de l’aliénation qui tranche avec son visage de poupée de porcelaine) entre l’assassinat de son Président de mari à Dallas le 22 novembre 1963 et son enterrement en grandes pompes trois jours plus tard, le film semble avoir pour but principal de figer son segment historique dans le temps, de l’exhumer pour le reconstituer et le ré-interpréter, comme une mémoire tente de permettre à un évènement vécu de faire résurgence, passé réanimé au présent. De faire de l’image même une mémoire, une interprétation plus ou moins certaine de l’Histoire.

Disparitions


Jackie est un film funèbre voire funéraire. En partant de l’évènement historique controversé de l’assassinat de JFK et par l’entremise d’un entretien que Jackie Kennedy avait donné à un journaliste de Life une semaine après l’enterrement de son mari, Pablo Larraín se permet de faire ressurgir le défunt. Cet entretien pour Life fait office de fil rouge, et Jackie (comme elle le dit à sa camériste Nancy [Greta Gerwig] : « Je ne suis plus Première Dame, appelez-moi Jackie » : appelons-la donc respectueusement par son simple prénom, comme le fait le film lui-même) s’y livre avec une dignité dure. En s’y livrant, elle tente de faire son deuil pourtant impossible, notion étrange qui fait de l’être manquant une omniprésence par le biais de la mémoire douloureuse. C’est ce deuil qui permet l’éclatement temporel du film, l’usage du flashback comme d’une mémoire fraîche de la violence des évènements. C’est ce deuil immédiat qui empêche Jackie de se séparer de son Jack au crâne ouvert, l’accompagnant dans l’ambulance qui transporte son cercueil, souhaitant insistamment mais en vain assister à son autopsie, ne souhaitant pas se libérer du corsetage ensanglanté qu’est son tailleur Chanel rose bonbon pour que le peu qu’il reste de lui (le sang sur les habits de sa femme) ne l’abandonne pas, elle.

On parle de film funéraire parce que Jackie semble raconter l’effacement d’une histoire éphémère. En concentrant son film sur trois jours (sans compter les séquences légèrement ultérieures de l’entretien pour le journaliste de Life [Billy Crudup]), Pablo Larraín met en scène l’évanouissement d’une ère au profit d’une autre. Evanouissement physique : JFK, comme la majorité des humains dans le rituel post mortem, disparaît de la surface de la Terre pour en rejoindre les profondeurs trois jours après sa mort. Dans un même élan, Jackie se doit d’effacer les traces de sa famille au sein de la Maison-Blanche, Lyndon Johnson (John Carroll Lynch) ayant immédiatement prêté serment dans l’avion ramenant le cadavre de Kennedy de Dallas à Washington, devant une veuve abattue se rendant compte qu’elle passe de tout à rien en une poignée de minutes. En quittant cette Maison-Blanche qualifiée de « maison vide et glaciale » face au journaliste de Life (le nom du journal semble lui-même cruellement ironique), Jackie et ses enfants (ainsi que son défunt mari) entérinent le fait qu’ils n’auront jamais vraiment semblé marquer l’histoire de ce lieu politique (et, ce faisant, de l’historie politique du pays) : Kennedy n’est pas Abraham Lincoln, lequel possède sa propre chambre-hommage au sein de la Maison-Blanche, muséifiant l’action politique majeure d’un homme auquel aucun président, Kennedy inclus, ne semble arriver à la cheville.

Lincoln est une obsession pour Jackie : quand elle demande à l’ambulancier qui transporte le cercueil de son mari qui sont James Garfield et William McKinley, il dit ne pas savoir ; par contre, il sait qui est Abraham Lincoln. Garfield, McKinley et Lincoln sont les trois Présidents américains assassinés pendant leur mandat avant que Kennedy ne soit le quatrième. De ce questionnement transpire la hantise de Jackie de voir son mari oublié tel Garfield et McKinley. De le voir évanoui dans les limbes du temps qui passe, comme son corps sera enfoui dans les terres humides du cimetière d’Arlington. Le propre frère de JFK, Bobby Kennedy (Peter Saarsgard), voit à raison en son frère un Président qui n’a rien fait, arguant du fait que la « crise des missiles » qu’il avait arrangée, avait auparavant été déclenchée par lui-même. Un fantôme de l’Histoire, en somme

Jackie est un film sur la peur de la disparition complète, de l’effacement total des traces qu’on a pu laisser (Lady Bird Johnson [Beth Grant] re-décorant la Maison-Blanche à son goût avant même le départ de Jackie), de sa perduration dans le temps, moins pour ce qu’on a laissé que pour ce qu’on fut un temps sous forme de phénomène de mode (Jackie croisant un magasinier déchargeant son camion rempli de mannequins Jackie Kennedy portant tous des tailleurs Chanel bigarrés). Peur injustifiée : les Kennedy ont bel et bien laissé une trace tenace dans l’Histoire. Dans l’Histoire des images.

Exister dans l’image

L’avènement de JFK à la présidence est concomitant de la domestication de l’image par les citoyens américains par le biais de l’écran de télévision. De cela, le couple présidentiel est bien conscient, et s’en est servi comme d’une arme fatale de communication. Comme l’a avoué le cinéaste Arthur Penn (alors au service de la communication de Kennedy) dans le préambule du livre primordial de Jean-Baptiste Thoret, 26 secondes – l’Amérique éclaboussée (éd. Rouge Profond, 2003), les débats télévisés de l’élection présidentielle de 1961 ont joué un rôle considérable dans la victoire du candidat démocrate face à un Nixon patibulaire et transpirant, visage annonciateur de sa culpabilité à venir (les aveux du Président dans l’affaire du Watergate : voilà un autre exemple d’images télévisées faisant et défaisant les carrières). Les Kennedy se sont donc servis de l’image comme d’une projection de leur beauté souriante qu’ils ont voulu faire passer pour le miroir reflétant le nouveau visage de l’Amérique. Bref, comme d’un instrument de popularité.

Pablo Larraín fait de l’archive l’élément majeur de la mise en scène de Jackie. Outre l’entretien que Jackie donne à Life (autre forme d’archive, capitale pour comprendre le comportement étonnamment froid et mécanique dans l’urgence du crime, son basculement sur le capot arrière de la Lincoln afin de ramasser le morceau de crâne de son mari assassiné et non de fuir le bruit et la fureur de l’horreur comme on l’a longtemps cru), le second fil rouge narratif est un reportage tourné pour la télévision américaine (et réalisé par Franklin J. Schaffner) dans lequel la Première Dame fait visiter la Maison-Blanche aux Américains plantés devant leur poste (film que l’on peut trouver sur YouTube et dont voici le lien pour les petits curieux : https://www.youtube.com/watch?v=MSIgTq7pb5U). L’archive est par définition le vestige d’une époque révolue ; le trouble que provoque l’apparition de cette archive dans Jackie est le constat qu’elle a été reconstituée (avec Natalie Portman à la place de Mrs. John F. Kennedy) avec un antique matériel de télévision des années 80 (comme l’explique le chef opérateur du film, Stéphane Fontaine, dans les pages des Cahiers du Cinéma [février 2017]). Le trouble est ici généré par la cohabitation impromptue entre le temps passé de l’archive (encore renforcé par la caméra utilisée, au grain d’image épais, ainsi que par la réutilisation du noir et blanc d’origine) et sa reconstitution contemporaine. Le trouble provient finalement de la modernité de l’archive, au tournage de laquelle Larraín nous convie ; Jackie, tendue comme un arc face à la caméra, joue le jeu comme une actrice débutante, moins dirigée par Schaffner (que nous ne voyons pas) que par sa fidèle assistante Nancy. Mi-godiche charmante, mi-maîtresse charismatique de l’Amérique à la voix d’une douceur hypnotique, Jackie Kennedy existe (sous les traits de Portman, actrice palimpseste) mais n’existe plus (l’archive de départ est effacée au profit du film lui-même). Une image s’est littéralement substituée à l’autre.

On pourrait voir ce choix comme un tour de force un peu tape-à-l’œil ; ce serait oublier que Pablo Larraín travaille la question de l’Histoire, de ses symboles, de ses détournements depuis ses débuts (ou presque : Tony Manero [2008] est son second film). Le discours sur l’image que décline Jackie repose au contraire en partie sur ce choix de la reconstitution. Reconstituer, c’est faire pareil différemment. C’est reconstruire à l’identique, mais dans une temporalité différente qui fera que la copie sera nécessairement différente du modèle. On ne peut refaire à l’identique ce qui a déjà été fait. On ne peut changer l’Histoire. On ne peut que la faire résonner avec le contemporain. Natalie Portman est un double factice, assez fidèlement ressemblant mais factice quand même.

La posture morale de Larraín, qui met le genre même du biopic en question (comme le faisait d’ailleurs la vision farceusement carnavalesque qu’il avait du fameux poète dans Neruda), est tenue durant tout le film, le cinéaste cherchant sur la durée de Jackie à utiliser les nombreuses archives de Jackie lors de la période qu’il traite pour tenter d’en saisir le hors-cadre. La façon qu’il a de filmer la descente de l’avion du couple présidentiel à Dallas, de mêler l’archive à sa propre mise en scène, est en cela exemplaire : il montre d’abord le couple dans l’avion, se levant après l’atterrissage pour sortir de la carlingue, la porte s’ouvre, ils s’apprêtent à sortir. Cut. L’archive montre Jackie et JFK saluant la foule et descendant de l’avion. Raccord en contrechamp : nous retournons à Larraín qui filme Jackie/Natalie Portman finissant de descendre la passerelle de l’avion, s’approchant du Maire de Dallas et de la foule pour recevoir le traditionnel bouquet de fleurs. Mêlant de façon homogène par le montage le réel de l’archive et la reconstitution qui reste une fictionnalisation de l’évènement (le dernier moment de la descente de l’avion est hors-cadre, comme l’étaient les encouragements de Nancy lors du tournage à la Maison-Blanche, donc à conjuguer au conditionnel), mettant en rapport et en raccord images passées et tournage présent, Pablo Larraín ne fait rien d’autre que de redéfinir la notion de mémoire, question qui fait appel à la fois à la réalité des faits et à leur réinterprétation. La mémoire est à la fois temporelle (la mémoire convoque l’époque précise d’un fait précis) et atemporelle (elle traverse le temps en étant constamment remise en question par les regards contemporains).

De fait, par sa façon aussi iconoclaste que philosophique de penser la question historique et, par conséquent, la question mémorielle, Pablo Larraín n’est pas très éloigné de la vision aussi éthique qu’esthétique d’Alain Resnais, celui de Muriel ou le temps d’un retour (1963), film où l’usage de l’archive (le « temps d’un retour » du titre) permettait la réactualisation d’une jeune fille disparue (Muriel) dans un lieu faussement serein (la France métropolitaine, en paix sur son territoire européen mais en conflit dans ses colonies) dans un temps postérieur à son évaporation dans les tortures de la Guerre d’Algérie.

L’archive aveugle

L’archive, dans le Muriel de Resnais, est un révélateur des horreurs des exactions des officiers français pendant la Guerre d’Algérie. Un révélateur qu’il faut dissimuler au risque de soulever la polémique. Car l’archive est révélatrice, c’est sa qualité réversible aux yeux de certains en défaut, aussi honnête que dangereuse. Elle est donc manipulable, ce que la mise en scène finalement très théorique de Larraín s’évertue à prouver en la reconstituant ou en en faisant un instrument de fictionnalisation (donc de mythologisation) de l’Histoire. Quand elle est manipulée, elle se transforme en écran fantasmatique.

Pablo Larraín n’utilise pas les images de l’assassinat de Kennedy sur Elm Street, ne les met pas en perspective avec sa propre mise en scène. Cela participe de l’éthique dont nous parlions quant à son utilisation des archives : quand il reconstitue ou qu’il fait de l’archive la charpente de ses propres images fictionnelles, Larraín ne fait rien d’autre qu’illustrer ce qu’est le couple Kennedy : une sorte d’utopie fantasmatique (confirmée par le fait que JFK lui-même se considérait comme le Roi Arthur à Camelot !), une sorte de real TV qui n’existe que dans l’histoire des images. Mais le cinéaste chilien n’a pas à réutiliser les très (trop) fameuses images du film d’Abraham Zapruder : tronqué, monté, remonté, taillé en pièces pour que ses photogrammes soient montrés dans les revues et magazines, examiné, fantasmé, parodié… Pas besoin de Larraín pour que l’archive devienne ici un écran fantasmatique (à ce sujet, lire 26 secondes – l’Amérique eclaboussée de Jean-Baptiste Thoret, dont nous parlions plus haut).

Na pas user de l’archive ne signifie pas faire la négation de l’évènement. Mais que faire quand l’image manque ? Se référer au texte : celui de l’entretien que Jackie donne au journaliste de Life. Un texte lui-même soumis aux lois de la manipulation (comme le film de Zapruder), raturé et corrigé par une veuve souhaitant se protéger de ses propres mots. L’instant de l’assassinat véritable de Kennedy, bascule dans l’histoire des images et de l’Amérique contemporaines ; il est ici filmé (et non réellement montré, la majorité de l’évènement restant hors-champ) en se focalisant sur la seule Jackie, qui subit la violence des jets de sang mais reste assez lucide pour aller chercher le fragment de boîte crânienne sur le coffre de la voiture pour tenter de rafistoler illusoirement son époux tué. La position de Larraín, encore une fois pleine d’à-propos, est très claire, dictée par l’impossibilité de filmer frontalement l’attentat puisque le manque préside dans la réalité (les photogrammes disparus du film de Zapruder, générant une fuite de la vérité comme le bout de crâne manquant provoqua un épanchement de la matière cérébrale de JFK). Le cinéaste se focalise donc sur le témoignage (certes partial) de celle qui a vu et vécu l’évènement de l’intérieur.

La scène, visuellement impressionnante, reste cependant la double reconstitution d’une archive littéralement aveugle, à la fois réitération d’un évènement tellement fantasmé et reconstitué qu’il semble ne plus exister (dans le même sens où l’archive de la Maison-Blanche reconstitué par Larraín n’existe plus réellement dans le film) et adaptation du témoignage de Jackie Kennedy (qui dit adaptation dit déformation). On pense alors à un autre film d’Alain Resnais, dans lequel un Japonais disait à sa maîtresse française qu’elle n’avait « rien vu à Hiroshima » (Hiroshima mon amour, 1959). Le sens profond de cette phrase, dite et répétée comme un mantra, est ce qui entraîne tout Jackie : on peut muséifier l’Histoire, on peut la fantasmer, on peut tenter de l’analyser, de la comprendre, on peut essayer de la reconstituer, de la revivre… mais l’Histoire ne se revit pas. La mémoire a ses béances (comme le film de Zapruder a ses photogrammes manquants), qui font de l’évènement historique une relativité à interpréter. En filmant l’attentat de l’intérieur de la voiture présidentiel, Pablo Larraín filme l’échec de la représentation, semblant nous dire « tu n’as rien vu à Dallas. » Même Zapruder n’a rien vu, il n’a qu’enregistré. Lacunairement.

Exhumations

Au-delà de l’immense émotion qu’il procure (nous nous sommes résolument penchés sur ce que le film recèle de théorique, mais nous n’avons pas parlé de l’incroyable force dramatique de Jackie,ceci dès l’ouverture au noir sous la houlette de la musique de l’incroyable Mica Levi, héritière de Bernard Herrmann), l’intérêt du chef-d’œuvre de Pablo Larraín est donc de penser l’image (cinématographique ou autre) comme instrument historique. Non pas apte à figer l’Histoire dans le marbre, mais à faire de l’Histoire une histoire, un conte puisant dans le réel, une narration à la vérité relative cherchant le plus possible à se rapprocher d’une réalité enterrée dans les cycles du temps. Larraín semble ici le revendiquer : son cinéma cherche à exhumer le passé afin de réactualiser une mémoire (des évènements, des hommes…) à ne pas perdre. Le cinéma est un art de l’exhumation.

Et comment ne pas le reconnaître quand, au détour d’une séquence, Jackie parle à un vieux prêtre interprété par John Hurt, décédé une semaine et demie avant la sortie française du film ? L’image cinématographique est comme les taches de sang sur le tailleur Chanel de Jackie, comme la moindre archive où l’on pourrait voir le couple Kennedy saluer les journalistes ou faire le tour de la Maison-Blanche : elle est une perduration au-delà de la mort (il est d’ailleurs à remarquer que Jackie fait elle-même exhumer les deux enfants qu’elle a perdus pour les faire inhumer au cimetière d’Arlington aux côtés de leur père, ceci afin de recréer la famille au-delà). Elle est une exhumation d’un passé révolu dans un temps présent (celui du spectateur). John Hurt, dont l’apparition choque si l’on y est pas préparé, est littéralement exhumé par Jackie. Nous disions au départ que le film de Larraín était un film funébre voire funéraire. Erreur : c’est l’art cinématographique qui l’est.

 

 

Michaël Delavaud

 

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