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26.02.24

Info parution : « Les cinéastes du Diable », par Yann Calvet

Si au cours du 19ème et du 20ème siècles, l’image terrorisante du diable, conservée dans le champ religieux et moral, a perdu de sa puissance dans l’imagination littéraire et dans les illusions de la fantasmagorie, le cinéma va produire de...

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25.09.23

Éclipses N° 72 : Clint EASTWOOD, l'épreuve du temps

Consacré à Clint EASTWOOD, le volume 72 de la revue ÉCLIPSES est actuellement en cours d'impression. Il sera très prochainement disponible sur ce site (en version imprimée et aussi en PDF) ainsi que dans votre librairie préférée. 

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02.12.22

Éclipses n°71 : Invasion John CARPENTER

John CARPENTER a eu un jour pour son propre compte une formule qui raconte beaucoup, tant de son esprit que du statut particulier dont il a écopé : « En France, je suis un auteur. En Allemagne, je suis un cinéaste. En Grande-Bretagne, je suis un...

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Le Locataire Roman Polanski

Le Locataire - Elle et l’huis clos (3/3)
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Elle et l’huis clos (1/3)

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Revoir : Vera Cruz  

Vera Cruz
(Robert Aldrich, 1954)

Pour une poignée de sales gueules

par Arnaud Devillard le 28.12.10

Vera Cruz est une curiosité à plus d’un titre. Son format, d’abord, le SuperScope, qu’il est le premier à utiliser et qui est un peu moins large que le CinemaScope (un rapport de 2 à 1 contre 2,35 à 1). Son cadre ensuite, soit le Mexique (où le film est entièrement tourné) de l’empereur Maximilien qui voit des cow-boys déambuler au milieu de pyramides aztèques et faire les rustres dans un palais digne de Sissi impératrice. Mais surtout, avec le recul sur l’histoire du genre, Vera Cruz donne l’impression d’être une bande-annonce de cette vague de westerns dits, terme malheureux, « révisionnistes ». L’essentiel est en effet déjà là : les anti-héros cupides et cyniques, l’humour grinçant, les réparties cinglantes, les visages luisants de sueur, sales, passés au brou de noix, des hordes (sauvages…) de sales gueules... Un peu de Sergio Leone (qui fit une mauvaise expérience du travail avec Robert Aldrich sur Sodome et Gomorrhe) et de Sam Peckinpah prend ses racines ici. Plusieurs coïncidences contribuent encore à cette impression.

Parmi les seconds rôles, on repère Ernest Borgnine, qui se fait tuer lors d’une bataille dantesque contre une armée au Mexique, comme dans La Horde sauvage, et Charles Bronson, qui joue de l’harmonica, avant d’en faire une habitude célèbre dans Il était une fois dans l’Ouest. Le personnage de Joe Erin (Burt Lancaster) a l’avant-bras droit enserré dans un brassard de cuir comme le Manchot de …Et pour quelques dollars de plus et lui et Ben Trane (Gary Cooper) font équipe bon gré mal gré pour récupérer une cargaison d’or, en traversant une guerre qui ne les concerne et ne les intéresse pas. Soit la trame de Le bon, la brute et le truand. L’irruption de cow-boys américains au milieu des combats entre l’empereur Maximilien et les rebelles juaristes évoquent Major Dundee quand l’aide qu’ils décident d’apporter, par intérêt, à l’empereur rappelle les hommes de La Horde sauvage faisant affaire avec l’armée fédérale mexicaine (en guerre contre Pancho Villa cette fois). Enfin, dans le film d’Aldrich, le retournement final qui voit Ben Trane, jusque-là peu impliqué dans les événements, se raccrocher à un idéal en décidant que l’or ira aux juaristes, fait penser à la décision des quatre bandits de Sam Peckinpah d’aller arracher leur copain Angel des mains du général Mapache, histoire de donner in extremis un sens à leurs actions. Plus troublant encore, à la fin de La Horde sauvage, Robert Ryan aura le même geste que Gary Cooper à la fin de Vera Cruz : prendre doucement le revolver de son frère-ennemi, avec l’air de mesurer tout le gâchis. Le personnage las et usé de Ben Trane semble lui-même être un brouillon de Pike Bishop et Deke Thornton dans le film de Peckinpah.

La représentation de la violence chez Aldrich annonce aussi beaucoup de choses. Le réalisateur donne déjà dans la tuerie anonyme ces ribambelles de figurants et de seconds couteaux qu’on élimine sans qu’on y prête garde plus que ça, alors que traditionnellement chaque mort compte et porte un nom, une histoire, une raison de se faire tuer. Dans Vera Cruz, au contraire, soldats de l’empereur et juaristes tombent comme des soldats de plomb (Ben Trane fait cette comparaison) balayés par une bille dans un jeu d’enfant. Tout cela n’est pas bien grave. La seule mort importante, c’est celle de Erin et Trane. Le duel final est alors l’occasion de redonner à un coup de feu toute sa gravité, quand, jusque-là, la quantité de cadavres jetés à terre procédait d’un genre d’anesthésie du spectateur. C’est exactement ce que fera Sergio Leone dix ans plus tard. D’un côté, la charrette de cadavres dans …Et pour quelques dollars de plus, de l’autre, le face à face Indio-Mortimer rythmé par le carillon d’une montre chargée d’un souvenir douloureux. Sam Peckinpah ira plus loin : dans La Horde sauvage, il n’y a même plus de duel…

De fait, Vera Cruz n’est pas loin de la parodie. Du début à la fin, Burt Lancaster arbore un sourire carnassier d’une blancheur publicitaire, lui donnant une allure proche du grotesque. Les complices de Joe Erin font l’objet d’authentiques scènes de comédie et il est difficile d’oublier ce carrosse escorté par des cow-boys passer le long de pyramides précolombiennes en lieu et place des rochers de Monument Valley.
Robert Aldrich semble d’ailleurs jouer la distanciation. Le cadre est régulièrement barré par un élément de décor en amorce au premier plan, sur le côté (un arbre, le bord d’un mur), en haut (une arcade, une branche d’arbre en arceau), en bas (une balustrade), voire des quatre côtés (une porte aux deux battants ouverts). L’action du film est ainsi comme repoussée un peu plus loin, inscrite dans un cadre dans le cadre soulignant le fait que tout cela n’est que spectacle. Non seulement le public de la salle y assiste, mais le réalisateur aussi.

Même le sursaut d’idéalisme de Ben Trane sonne un peu faux. Tout le long du film, la plupart des personnages ont joué double-jeu, se trahissant les uns les autres. Embrasser la cause juariste au dernier moment n’apparaît alors que comme un revirement de plus. On peut aussi y voir une concession faite à la tradition, qui veut des héros aux valeurs positives. Robert Aldrich finit par en donner un. Mais qui peste d’avoir dû tuer pour ça un homme qui était en train de devenir son ami. Une concession à la tradition ? Plutôt un pied de nez.

Arnaud Devillard

 

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